Tirer les cartes


TIRER LES CARTES

Ça fait pas mal toute ma vie j’adore Brian Eno.
Je le considère comme un des grands talents de notre époque.
Another Green World, Here Come the Warm Jets et My Life in the Bush of Ghosts, sont trois de ses disques qui m’habitent encore.
(Pis c’est lui qui a produit Are We Not Men et Remain in Light).
Alors le fait qu’il participe au FICFA, et ce depuis déjà huit ans, me réjouit
à chaque novembre.

Oblique Strategies, est un genre de tarot pour les temps modernes qu’Eno a conçu 
avec l’artiste visuel Peter Schmidt, en 1974. La première édition de leur
jeu de carte comprenait 113 ‘stratégies’, des suggestions pour comment sortir d’une impasse créative. Objectifs obliques emprunte le paquet Eno/Schmidt (version numérique, hélas) et invite sept pairs de créateurs à venir jouer aux cartes.

Normand Pothier, Samuel Gagnon, 
Julie Frigault, Dominique Léger, Jennifer Bélanger, Sylvain Ward, Emmanuelle Landry, Angie Richard, Tracey Richard, Lucie Aounetse, Marie Lamarche, Gilles Doiron et Éric Arsenault participent à l’immense joute, main de maitre ‘arbitrée’ par l’animateur Philip André Collette.

La dichotomie Eno/Schmidt, Objectifs/Obliques, Artiste1/Artiste2, s’applique également à la soirée divisée en deux nettes ‘demis’ : la projection et la discussion. 
Les deux forment un tout.

Comment adopter la stratégie pigée ?
Comme un style ? Comme une didascalie ? Comme un synopsis ?
Comme un dare ? Comme... le nom d’un groupe rock ?!

Fascinant de voir comment les sept pairs de créateurs répondent audio/visuellement à leurs sept cartes.

       Courage
       Entre dans le domaine de l’impossible
       Éloigne-toi du désir
       Demande à ton corps
       Accumulation
       Accentue les défauts
       Va vers l’insignifiant (TTU !)

Chaque duo présente une œuvre différente à bien des égards
de toutes les autres réalisations. Un faux documentaire. Un drame romantique. Un film expérimental. Un drame aquatique. Un film d’animation.
Une parodie mordante. Un film de super-héros.
Un impressionnant étalement de la souche, on dirait sans fin, de talent local.

Entendre, par la suite, les nombreux défis créatifs et stylistiques et logistiques
et autres des sept projets, superpose un niveau considérable au visionnement.
Un « director’s commentary » multiplié par quatorze !
On y entend des pépites d’information capables d’altérer, instantanément,
ses fraiches mémoires encore malléables.
Comme celle-ci : les fleurs utilisées comme matière première d’animation par Richard/Richard proviennent des funérailles récents de leur grand-père.
Ou : Aounetse/Lamarche ont considéré le néo-réalisme comme genre filmique avant d’orienter leur choix vers le ‘soap opera’.

Pour clore cet article, je vais évidemment laisser le dernier mot à Eno/Schmidt ;
par le biais d’une ‘stratégie oblique’ consultée sur le web (et je vous jure sur
la tête de Talking Heads j’ai pas triché) :

            Is there something missing ?/Il manque quelque chose ?

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